Voici le texte de l’homélie que le cardinal Jozef De Kesel a prononcée lors de la messe d’envoi de la journée Tous disciples en mission qui s’est déroulée à Nivelles le 20 octobre 2019.
Chers amis,
Dans l’évangile de ce dimanche Jésus nous demande de toujours prier sans se décourager. Et la raison est celle-ci : parce que Dieu est un Dieu qui écoute. Ce qui n’est pas le cas du juge dont il parle. C’est en vain que la veuve lui demande de lui venir en aide. Il n’a aucun respect pour cette pauvre femme. Si, finalement, il l’écoute quand-même, c’est parce qu’elle l’ennuie et qu’il veut se débarrasser d’elle. Le sort de cette femme ne l’intéresse pas.
Dieu est tout autre. Il n’est pas indifférent. Il est un Dieu qui écoute. Voilà pourquoi je voudrais vous dire ce qui suit. Et je m’adresse surtout à vous les jeunes. Je sais que pour vous l’amitié est tellement importante. Imaginez-vous que personne ne s’intéresse à vous, que vous ne comptez pour personne, que vous ne soyez pas aimé. Que personne ne vous écoute, comme si vous n’existiez pas. Qu’on vous laisse toujours de côté. Vous seriez tristes.
C’est l’indifférence qui nous rend si malheureux. Il est tellement important d’être toujours à l’écoute de l’autre. Vous êtes encore jeunes. Personne de vous n’a demandé la vie. Vous l’avez reçue. C’est un cadeau énorme. Vous avez la vie devant vous. Vous pouvez en faire quelque chose de beau. A une condition : de ne pas chercher uniquement votre propre profit. Il y a des gens qui ne vivent que pour eux-mêmes. Qui ne cherche que leur propre intérêt. Qui ne pensent qu’à eux-mêmes. Qui vivent uniquement pour eux-mêmes. Ils ne trouveront jamais le bonheur. C’est l’écoute, le partage, l’amitié qui rend la vie si belle, si digne d’être vécue. Et cela ne vaut pas seulement pour votre vie personnelle, mais aussi pour la société. Le Pape François nous met toujours en garde : dans notre monde actuel, devant le défi de la pauvreté et de la violence, l’indifférence est en train de se mondialiser. Il faut résister. Vous aussi, chers jeunes, vous devez dès maintenant vous préparer à vous engager pour une société plus juste et plus humaine.
Si je vous dis tout cela, à vous les jeunes mais aussi à vous tous et toutes ici rassemblés, c’est parce que nous sommes chrétiens, disciples du Christ, disciples en mission. Parce que cette voie de l’écoute et de l’amitié, de l’engagement et de la solidarité, c’est la voie de l’évangile, le chemin que Jésus nous a montré. C’est à juste titre que le Pape François parle de la joie de l’Evangile. Parce que l’Evangile est une joie. C’est l’annonce de l’amour de Dieu et de sa solidarité avec notre monde. Nous sommes connus et aimés de Dieu, infiniment aimés. Il a même voulu partager notre condition d’homme, dans toute sa pauvreté et fragilité.
Une fois qu’on a reçu ce message, cette bonne nouvelle, on ne peut plus rester indifférent. L’Evangile nous fait connaître l’humanité de Dieu et nous rend en même temps nous-mêmes plus humains. L’Evangile nous pousse à sortir et aller à la rencontre de notre prochain. C’est ainsi que le Pape insiste sur une Eglise « en sortie ». Je sais que dans notre monde actuel Dieu risque de devenir le grand Inconnu. D’où notre mission : de le faire connaître. Mais de le faire connaître à la manière de l’Evangile. La foi n’est pas d’abord une doctrine mais une relation. C’est pourquoi être disciple en mission n’a rien à voir avec de la publicité ou de la propagande. L’annonce de l’Evangile se fait toujours dans le contexte d’une rencontre. Et il n’y a pas de rencontre sans le respect de l’autre. Nous n’avons rien à imposer. Notre vraie force c’est notre témoignage personnel en tant que chrétien et la qualité évangélique de nos communautés.
« Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? ». Voilà la question que Jésus pose à la fin de l’évangile de ce dimanche. Mais écoutons bien. Il ne demande pas si tout le monde sera converti quand le Fils de l’homme viendra. Notre mission n’est pas de faire disparaître toutes les autres religions ou convictions. Nous vivons dans un monde pluraliste et multireligieux. C’est au cœur de ce monde que nous sommes appelés à être disciples en mission : à être signe de l’amour de Dieu, amour non seulement pour l’Eglise mais précisément pour ce monde. Quand Saint François envoya quelques frères en Afrique du Nord en pays musulmans, il leur demanda de témoigner de l’Evangile par leur vie et, disait-il, si c’était nécessaire, aussi par des paroles. Puisse cet exemple nous inspirer aujourd’hui. Pour qu’on ne dise pas de nous : ils disent mais ne font pas !